Ils sont apparus aux yeux et aux oreilles du grand public en 2019 avec L’Adresse, un album inattendu pour ces trois jeunes artistes repérés sur internet avec leur série de reprises clippées «On vient gâcher tes classiques». Disque de platine, concerts remplis, 47Ter (un nom en référence à l’adresse de la salle. des fêtes de leur quartier, rappelons-le) a su dès le départ imposer son style original, ni tout à fait rap ni complètement chanson, un mix inédit de mots et de mélodies avec un irrésistible arôme pop.
La suite logique, le deuxième album Légende, est parasitée par la pandémie. Il était temps de rebondir. «J’avais dit“ Deux ans pour le milli”, j’avais pas le COVID en tête» : dès cette «Intro» du nouvel album en forme de récapitulatif des précédents épisodes, Pierre-Paul, Blaise et Lopes, les trois complices de Bailly (Yvelines,78) posent le décor, celui d’un retour non pas en force mais en douceur, avec l’élégance d’un trio qui évolue et affine sa formule, celle d’un groupe qui se remet en question.
«Rendez-vous l’année prochaine», annonçait le dernier clip de 2022. Parole tenue avec Au Bon Endroit, dont on se mord les lèvres pour ne pas utiliser le cliché d’album de la maturité tant il correspond à cette définition. En effet, voilà un disque qui réussit l’exploit de correspondre aux attentes des fans de 47Ter tout en élargissant son champ d’action. Pierre-Paul : «J’adore les chansons françaises avec piano voix et énormes refrains. Mon ambition, c’est de faire de la chanson française avec tous les codes musicaux d’aujourd’hui, faire ce mélange là».
Alors, ce nouvel album ? Pop ? Rap ? Chanson ? «On a toujours été mis dans des cases, au début dans le rap, après en mode pop je ne sais quoi... Nous on ne réfléchit jamais à dans quelle case on veut rentrer» affirme Pierre-Paul. «D’ailleurs, “CVC” c’est quatre minutes de rap sans refrain et à côté on a “On verra bien” qui est un guitare voix varièt’, parcequ’on kiffe les deux» complète Blaise.
«On a passé des mois à travailler l’album, on n’a vu personne pendant des semaines, ducoup on perd de moments de vie avec des proches. On prépare toujours le futur et on oublie un peu le présent», se rappelle Pierre-Paul.
Durant ces longs mois de travail en studio pour finaliser cet album dont ils sont si justement fiers, les trois 47Ter ont croisé la route de plusieurs nouveaux collaborateurs. «Où tu voudras», featuring Tayc, est une promenade en territoire afro, une prise de risque assumée qui sonne comme un vrai hit. Lopes: «C’étaient les conditions parfaites d’une collaboration avec un autre artiste. Le son afrolov’ était nouveau pour nous, mais ça a tellement bien marché que Tayc l’a validé». Mosimann, qui signe la prod de «Feeling», apporte une touche dance floor avec un piano entêtant sur rythmique funky. Et parcequ’il faut se faire plaisir, les 47Ter ont accompli leur rêve de gosse : inviter leur rappeur favori du 78, LaFouine. Pierre-Paul : «On est du 78 et c’était notre rêve ultime. Un jour, on fait un son et on se dit “Ça serait fou d’avoir La Fouine dessus”. On se parlait sur Instagram, on lui a envoyé un message et quand il a entendu la prod de “Si j’avais” il a dit “Trop lourd, je suis chaud”. On est allés en studio chez lui à Las Vegas, on a tourné le clip, c’était génial».«Il y avait un truc très mélodique dans la chanson qui collait vachement avec ce qu’on adorait de La Fouine», ajoute Lopes.
«Autour de moi», réflexion autour de la crédibilité musicale et du syndrome de l’imposteur sur une instrumentale épique, n’hésite pas à évoquer les doutes et les failles qui font les grands morceaux. Et pour ceux qui restent avides de flow, «CVC» est là avec son texte fleuve, ses accélérations linguistiques et ses thèmes en stock, une réflexion en profondeur, cerise hip-hop sur le gâteau d’un album riche, celui d’un groupe soudé qui a trouvé sa troisième voie et a hâte de le défendre sur scène. «On verra bien comment ça se finit», chante Pierre-Paul sur «Feeling». Pour 47Ter en tout cas, ça redémarre.Fort.